Raison d'être du blog Réalités scandinaves

Cher lecteur, ce blog a pour vocation d'analyser de manière pragmatique les pays scandinaves, d'un point de vue géopolitique et géoéconomique, c'est-à-dire en faisant appel aussi bien à la science politique, l'économie industrielle ou la stratégie marketing. Mon cursus universitaire est assez varié, c'est pourquoi j'aborderai différentes problématiques au cours de l'année.

Par ailleurs, ce blog m'est utile pour mes études - même s'il n'est pas obligatoire - afin de poser ma réflexion et mes idées. N'y voyez aucun engagement politique de ma part. J'espère seulement vous proposer une critique constructive des choses, en tout cas ma vision basée sur des faits sourcés.

Je suis également sur Twitter.

Vos commentaires sont évidemment les bienvenus. Bonne lecture !

La Scandinavie est une zone géographique comprenant, approximativement, la Norvège, la Suède, le Danemark et la Finlande. Ces pays, peu peuplés, de faible densité et d’une grande homogénéité ethnique et linguistique, partagent une histoire, une culture et des valeurs communes.

Les pays scandinaves sont sans aucun doute les plus appréciés au monde. A leur évocation, les valeurs d’humanisme, d’écologie, de qualité de vie, de rectitude, de pacifisme… reviennent régulièrement. En effet, le capitalisme scandinave se caractérise par des acquis sociaux importants et une solide compétitivité des économies nationales, offrant ainsi un niveau de vie rarement égalé dans le monde. Le système politique, malgré des différences entre pays [1], est très consensuel et apprécié pour sa transparence. Les pays scandinaves sont généralement placés en tête de liste des pays les moins corrompus.

Le protestantisme luthérien [2], socle historique de la Scandinavie, n’est pas étranger à cette réussite et irrigue profondément les différents pays. Selon Martin Luther, puisqu’il ne peut y avoir de hiérarchie au sein de l’Eglise, chaque personne – quel que soit son sexe, sa naissance, sa richesse ou sa fonction/travail – a une place de valeur identique. Ainsi, tout en critiquant le caractère absolu et intangible de l’Eglise catholique, Luther avance qu’un système social doit respecter la pluralité et les libertés, la discussion et l’échange.

Aussi, la solidarité, l’égalité et l’humilité sont les bases des sociétés scandinaves, le collectif primant sur l’individu(alisme) [3]. De fait, la Bible transmet des principes de vie, sur lesquels chaque personne se réfère. La notion de transparence en découle, puisque chacun est responsable : vis-à-vis des autres dans l’utilisation des biens communs, dans la sécurité et le bien-être matériels de la communauté, etc. ; vis-à-vis de lui-même, puisqu’il doit, tout au long de sa vie, confirmer son élection (place centrale du travail chez les protestants).

Ces valeurs se retrouvent évidemment dans le modèle socio-économique scandinave. Ainsi, la prégnance de l’Etat-providence a pour objectif de corriger les inégalités (éducation, santé, logement…) et le système d’imposition, parmi les plus lourds au monde, finance un système social universel et généreux (Cf. La flexsécurité à la danoise, conjuguant la facilité de licenciement avec d’importantes indemnités chômage). Aussi, les revenus des Scandinaves sont plus égaux que dans le reste de l’OCDE, grâce aux impôts et transferts gouvernementaux.

Toutefois, paradoxalement, l’Etat intervient peu dans le monde des affaires et le commerce, mis à part quelques entreprises/secteurs stratégiques. Les économies sont largement privatisées et dérèglementées. Les taux d’imposition des entreprises restent bas et les pays scandinaves ont plutôt un tropisme libre-échangiste. Ainsi, les Scandinaves, pragmatiques, disposent de solides positions dans les secteurs de haute technologie (énergie, information, pharmacie…). Malgré des coûts élevés, les entreprises scandinaves compensent par des produits à forte valeur ajoutée, des infrastructures performantes et une productivité solide du fait d’un personnel très qualifié (haut niveau d’éducation de l’ensemble de sa population) et loyal. Les valeurs luthériennes sont symbolisées par une recherche permanente de l’efficacité qui se retrouve dans l’excellence technologique.

De même, du fait de marchés étroits, les entreprises scandinaves ont très tôt misé sur les exportations de produits innovants, vers les grands marchés matures (Europe et Etats-Unis) mais également les économies émergentes (Chine, Russie…). Bien que « petits », les pays scandinaves disposent de quelques fleurons de réputation mondiale, du fait de dépenses de recherche et développement par rapport au PIB parmi les plus élevées au monde.

Néanmoins, tout ceci ne peut expliquer seul les bons résultats économiques des pays scandinaves, ni leur bonne réputation. Une autre analyse peut être faite des valeurs luthériennes, où le pragmatisme est un réalisme froid (voire un cynisme), la solidarité de la collusion et la recherche des signes de son élection un certain narcissisme.

Cette objectivité de l’analyse permet, au regard de quelques exemples d’entreprises scandinaves performantes, de réaliser que le principe de réalité est très ancrée dans la conscience des Scandinaves. Ils ont compris les différents enjeux économiques et politiques de la mondialisation actuelle, de cette lutte pour la richesse et le pouvoir, et utilisent leur réputation positive à des fins pécuniaires et de domination : préservation d’un mode de vie, enrichissement de la communauté nationale, renforcement du patriotisme... 

Les dossiers présentés sur ce blog permettent également de casser les préjugés positifs que nous pouvons avoir, en Belgique, sur ces pays, sur leur idéalisme… et de s’en inspirer afin de tirer les bénéfices de notre ouverture économique, commerciale et politique.

---

[1] Les architectures politiques sont très différentes : la Suède, la Norvège et le Danemark sont des monarchies alors que l’Islande et la Finlande sont des républiques.

[2] Martin Luther (1483-1546) est un théologien allemand, dont les idées exercèrent une grande influence sur la Réforme protestante.

[3] Il y a une grande différence avec le calvinisme, qui promeut d’une certaine manière l’individualisme. En Scandinavie, l’individu fait partie d’une communauté. Par conséquent, l’individualisme, source d’injustices et d’inégalités, est moralement condamné.